Colloque international organisé par le laboratoire Criham (Université de Poitiers et Limoges), l'École française de Rome et l'Académie de France à Rome (Villa Medici), sous la direction d'Albrecht Burkardt et de Jérôme Grévy.

• 25-26 février 2016

• Rome
École française de Rome, place Navone (jeudi 25 février)
Académie de France à Rome – Villa Medici, Trinità dei Monti (vendredi 26 février)

 

 

Présentation

Ce colloque représente le troisième volet d’une série de rencontres étudiant l’usage politique des « restes » du passé vénérés par les hommes. Après les reliques, sacrées ou profanes, on se propose désormais d’aborder le sujet des ruines. Qu’il s’agisse de les effacer, de les dégager, de les protéger, de les transformer ou de reconstruire sur leurs fondations, bien des ruines, en effet, furent l’objet de débats et polémiques parfois virulents. Les autorités civiles comme religieuses, la classe politique ou l’opinion publique s’en saisirent comme des symboles d’un âge révolu, idéalisé ou honni.

Ces débats se font sur toile de fond d’une tradition de longue durée. Encore récemment, Salvatore Settis a rappelé à quel point l’Occident – contrairement à d’autres civilisations – a pu faire sienne une vénération particulière des ruines en tant que telles. Settis pense ici en particulier à celles de l’Antiquité. Ce ne sont pourtant pas les seuls restes de ce type, mis en vénération, transformés en lieux de mémoire, ou, au contraire, bannis de celle-ci. On est en droit de penser que notamment l’époque contemporaine a multiplié les inventions d’objets de ce genre, et ont changé par là même les types d’usage, de même que leur signification. Alors que, dans les périodes pré-modernes, la symbolique des ruines vit sans doute prioritairement de l’antagonisme entre traditions profanes et religieuses – le christianisme naît-il pas, selon un motif iconographique bien répandu à la Renaissance, dans les ruines de l’Antiquité païenne ? – la modernité, à coup sûr, impose (ou ajoute) d’autres dimensions de sens, qu’il s’agisse de symboliser la chute d’un régime (les restes du mur de Berlin, par exemple), ou (et) de mémoriser les terreurs de la guerre (comme dans le cas, toujours à Berlin, de la Friedrich-Wilhelm–Gedächtniskirche).

Dans ces diverses mises en scène, fonctions et signification politiques des ruines semblent patentes. Toujours vaut-il la peine d’entrer dans les détails en cherchant, d’une part, à faire l’inventaire des différentes « matières » et constellations menant à la valorisation politique de ces restes, en analysant, d’autre part, la signification politique précise que revêt leur « invention », ou encore les multiples sens que révèle sans doute leur réception.

Le colloque cherche à explorer ces questions dans une visée trans-période, depuis l’antiquité jusqu’à l’époque contemporaine. Il s’adresse prioritairement aux historiens mais est ouvert également aux autres sciences humaines, à commencer par l’histoire de l’art.

 

Programme

Jeudi 25 février 2016

École française de Rome, Place Navone

• 9h – Accueil par Catherine Virlouvet, Directeur de l’École française de Rome, et Fabrice Jesné, Directeur des études modernes et contemporaines

• 9h15 – Introduction thématique Albrecht Burkardt et Jérôme Grévy

 

Restes d’un âge d’or

Présidence de séance : Fabrice Jesné

• 9h30 – Charles Davoine, Université d’Aix-Marseille
L’empereur et les ruines dans le monde romain : la reconstruction au service de l’âge d’or (Ier siècle av. J.-C. – IVe siècle ap. J.-C.)

• 10h – Raquel Alonso Álvarez, Universidad de Oviedo
L’utilisation du passé chez les évêques Arias et Pèlage d’Oviedo (Espagne, XIe-XIIe siècles) : Ruines, reliques et objets somptueux

• 10h30 – Clémence Revest, CNRS – Centre Roland Mousnier
Monumentaliser le « réveil » des lettres latines aux débuts de l’humanisme : autour de la polémique déclenchée par la destruction d’une statue de Virgile à Mantoue (fin du XIVe s.)

• 11h15 – Angela Quattrocchi, Università di Reggio Calabria
“Ce qui reste de Rome”: les ruines comme reliques politiques des États Pontificaux

• 11h45 – Dino Mengozzi, Università di Urbino
La beauté des ruines et l’essor de la conscience nationale italienne. Du Grand Tour au vol de la Gioconda

• 12h15 – Discussion

 

Conserver

Présidence de séance : Marina Caffiero

• 14h – Éric Hassler, Université de Strasbourg
Fabriquer le caractère ancestral du pouvoir seigneurial : la conservation des vestiges médiévaux lors de la baroquisation des résidences seigneuriales dans les pays héréditaires de la maison d’Autriche, fin XVIIe-début XVIIIe siècle

• 14h30 – Roger Baury, Université Charles de Gaulle – Lille 3
Les châteaux en ruine, entre antagonismes mémoriels et passions politiques de la fin de l’Ancien Régime à nos jours

• 15h – Bruno Bethouart, Université du Littoral Côte d’Opale (ULCO)
Les remparts urbains : de la destruction à la valorisation des ruines dans la France du Nord à l’époque contemporaine.

• 15h30 – Discussion

 

Effrayer

• 16h – Hugues Marquis, Université de Poitiers
De l’usage politique des ruines dans les guerres de la Révolution

• 16h30 – Gilles Malandain, Université de Poitiers
Que reste-t-il de la bataille? Vestiges et monuments de Waterloo

• 17h – Éric Fournier, Université de Paris 1 – Panthéon-Sorbonne
Paris et la Commune de 1871 : les ruines et les brèches révolutionnaires

• 17h30 – Jean-Noël Grandhomme, Université de Lorraine
« Ici fut Fleury ». Les villages détruits de la Première Guerre mondiale : utilisations politique et pédagogique (1918-2016)

 

Conférence d’histoire de l’art

Cycle des Jeudis de la Villa
20h30

Salvatore Settis, Scuola Normale Superiore di Pisa
La città storica : un modello in rovina

 

Vendredi 26 février 2016

Académie de France à Rome, Villa Medici, salle Michel Piccoli

 

Montrer l’indicible

Présidence de séance : Jérôme Delaplanche

• 8h30 – Mot de bienvenue par Jérôme Delaplanche, Chargé de mission pour l’histoire de l’art

• 8h45 – Emmanuelle Danchin, SIRICE (UMR 8138)
Conserver la mémoire de la guerre ou effacer ses traces ? Le débat en France de la préservation des ruines de guerre (1915-1921)

• 9h15 – Julie Descepper, INALCO
Monumentaliser la Grande Guerre Patriotique : De l’usage politique des ruines en Russie à l’exemple de Schlisselbourg

 

Visite de la Villa Medici

10h / 11h

 

• 11h – Chantal Dhennin, Université Lille Nord de la France / HLLI, ULCO
Les blockhaus d’Illies : des reliques politiques

• 11h30 – Stéphane Michonneau, Université Charles de Gaulle – Lille 3
Belchite, un village-martyr pour la cause franquiste

• 12h – Sabine Forero Mendoza, Université de Pau et des pays de l’Adour
Ruiner deux fois. Le terrorisme culturel

• 12h30 – Discussion

 

Narrer

Présidence de séance : Salvatore Settis

• 14h30 – Philippe Akar, ANHIMA (UMR 8210)
La construction des reliques par le texte : la mention des lieux de la mémoire dans l’écriture de l’histoire de la République romaine

• 15h – Maer Taveira, EHESS
Entre ruines et légendes. Usages, représentations et interprétations des ruines « arthuriennes » dans une géographique politique médiévale

• 15h30 – Audrey Norcia, Université de Paris1 – Panthéon-Sorbonne / HiCSA-CPC
La ruine, un dispositif plastique pour penser l’Histoire. L’exemple d’Anne et Patrick Poirier et de Jochen Gerz

• 16h15 – Samuel Boussion, Mathias Gardet, Université de Paris 8 ; Martine Ruchat, Université de Genève
« Des millions d’enfants se sont éveillés à la vie dans un monde de ruines et de mort ». Les communautés d’enfants : usage politique d’une utopie pédagogique

• 17h – Débat final et conclusions

 

Comité scientifique

– Marina Caffiero (Università di Roma – « La Sapienza »)
– Pierre-Antoine Fabre (CARE/EHESS)
– Dominique Iogna-Prat (EHESS)
– Dino Mengozzi (Università di Urbino)
– Alain Schnapp (Université de Paris I)
– Gerd Schwerhoff (Technische Universität Dresden)
– Jean-François Sirinelli (IEP de Paris)

 

Comité d’organisation

– Albrecht Burkardt
Jérôme Grévy
– Alexandra Beauchamp
Thierry Favier
– Bertrand Lançon
– Gaëlle Tallet
Simone Visciola