Thèse de doctorat en Histoire de l'art contemporain préparée par Clara Auger, sous la direction d'Estelle Leutrat (Université de Poitiers, Criham).

• Date de dépôt du sujet : 2016

 

Présentation du thème de recherche

Les sculpteurs français et l’art de cour en Espagne au XVIIIe siècle : l’exemple de l’atelier de Valsaín

Les sculpteurs français dont la carrière se déroule totalement ou partiellement au service des rois d’Espagne sont relativement nombreux au XVIIIe siècle, dans le cadre des deux principales constructions royales alors entreprises : La Granja de San Ildefonso à partir de 1720 et le nouveau Palais Royal de Madrid, dès 1735. Si leurs ateliers se concentrent sur ces deux pôles, une partie de leurs productions se destine aux sites royaux environnant la capitale, tels qu’Aranjuez, Le Pardo ou Riofrío. En 1721, Philippe V et Élisabeth Farnèse font pour la première fois appel à des sculpteurs français, inaugurant ainsi le processus de création d’une équipe dominée par les compatriotes du roi pour entreprendre l’ornementation sculpturale des jardins de La Granja de San Ildefonso. Ainsi, la mise en place de ce chantier marque-t-elle une rupture dans la sculpture de cour en Espagne, dominée, sous les Habsbourg, par des maîtres italiens ou espagnols. La prédominance française se trouve concurrencée dès 1740 avec la nomination de l’Italien Olivieri à la tête du chantier de sculpture du palais royal de Madrid, mais le recours aux sculpteurs français ne prend fin que sous le règne de Charles III, grâce à la formation d’une génération de sculpteurs nationaux au sein de l’Académie Royale des Beaux-Arts de Saint-Ferdinand, créée en 1752.

D’une ampleur conséquente, l’ornementation sculptée des jardins de San Ildefonso s’achève en 1746 et nécessite l’établissement d’un atelier spécialisé, polyvalent et autonome, installé à Valsaín, site royal voisin. Plusieurs sculpteurs français se succèdent au sein de l’équipe nourrie qu’il héberge. Seuls les artistes qui ont dirigée celle-ci sont connus : Jean Thierry (directeur de 1721 à 1727), René Frémin (de 1721 à 1738), Jacques Bousseau (de 1738 à 1740), Hubert Demandre (de 1740 à 1780) et Pierre Puthois (de 1740 à 1761).

Les modalités de fonctionnement de cet atelier fondé par Thierry et Frémin varient au cours du temps, sous l’effet des réformes royales et de la personnalité des directeurs successifs. Il connaît notamment une restructuration totale suite à la mort prématurée de Jacques Bousseau en 1740. À la conclusion des jardins de San Ildefonso, Demandre, Puthois et leur équipe, de plus en plus réduite, demeurent en Espagne où ils sont les auteurs d’œuvres prestigieuses, commanditées par Ferdinand VI, comme le monument funéraire de Philippe V et Élisabeth Farnèse (1756-1758), ou par cette dernière, comme l’ornementation des escaliers et de la chapelle du palais de Riofrío (1758-1766). Ils exécutent également des œuvres pour le palais royal de Madrid et participent, tout comme leurs compatriotes servant directement Ferdinand VI, à une vaste réflexion sur l’enseignement des arts en Espagne engendrée par la création de l’Académie Royale des Beaux-Arts de Saint-Ferdinand.

Sur près d’un demi-siècle, les sculpteurs français contribuent ainsi, depuis Valsaín, au renouvellement stylistique de la statuaire espagnole, à l’élaboration d’un nouveau langage princier et à la formation de nouvelles générations de sculpteurs issus de la péninsule. Leur capacité à satisfaire aux exigences royales repose certes sur leur talent personnel, mais aussi sur l’organisation très structurée qu’ils mettent en place au sein de l’atelier collectif de Valsaín, où ils introduisent nombre d’innovations provenant des chantiers royaux franciliens.

Cette thèse se donne pour objectifs l’étude de cet atelier, des sculpteurs qui le composent et de son fonctionnement, ainsi que des œuvres qui en proviennent.

 

École doctorale

ED 612 Humanités – Université de Poitiers