Journée d'études organisée par la Fédération de recherche Territoires et le laboratoire Criham (axe Environnement, territoires, circulations), avec les laboratoires CEMMC (Bordeaux-Montaigne), ITEM (Pau) et la Société française d’histoire politique – dans le cadre du programme Appel à projet de la Région Nouvelle-Aquitaine, ELURENAQ, sous la direction scientifique de François Dubasque (Université de Poitiers, Fédération Territoires, Criham).

• Vendredi 17 novembre 2023 – 9h15 / 16h30

• Poitiers, Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, Maison de Poitiers
15 rue de l’Ancienne Comédie

• Sur inscription préalable, jusqu’au 13 novembre

 

 

Cette manifestation s’inscrit dans le cadre des séminaires conjoints de la Fédération de recherche Territoires et de l’axe Environnement, Territoire, Circulations du Criham. Elle vient clore le cycle de rencontres scientifiques organisées avec les universités de Pau et des Pays de l’Adour et de Bordeaux Montaigne, dans le cadre du programme régional sur « Les élus régionaux de la décentralisation ». Enfin, elle est parrainée par la Société française d’histoire politique dont l’une des thématiques structurantes est consacrée aux lieux du politique.

 

Programme

Matinée

9h15 / 12h15

• 9h15 – Accueil

• 9h30 – Laurent Jalabert, université de Pau et des Pays de l’Adour
Introduction à la journée

• 9h45 – Jérôme Grévy, université de Poitiers
Les mairies, lieu du pouvoir municipal. Quelques exemples dans le département de la Vienne

• 10h10 – Bernard Lachaise, université Bordeaux-Montaigne
De la sous-préfecture à l’Hôtel de ville : l’exemple de Ribérac (Dordogne)

• 10h35 – Discussion et pause

• 11h – Nadia Ayache, université Bordeaux-Montaigne
L’Hôtel du département du Lot-et-Garonne, un lieu de pouvoir inscrit dans la mémoire des Agenais

• 11h25 – Témoignage de Maxime Pedeboscq, conseiller municipal de Poitiers et vice-président en charge des Sports à Grand Poitiers Communauté urbaine

• 11h50 – Discussion

Après-midi

14h / 16h30

• 14h – Dominique Royoux, université de Poitiers
1980-2020 : l’évolution des nouveaux lieux du politique à Poitiers, reflet de la place grandissante des activités de services dans l’économie contemporaine

• 14h25 – François Dubasque, université de Poitiers
L’hôtel de région de Poitou-Charentes, l’affirmation d’un nouveau lieu de pouvoir à l’heure de la décentralisation ?

• 14h50 – Marie-Christine Bouneau et Sylvie Guillaume, université de Bordeaux-Montaigne
Le Conseil régional, de l’établissement public régional EPR (1972) au Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine :  extension de l’espace et élargissement des compétences

• 15h20 – Discussion

• 15h40 – Marie Ferru, université de Poitiers
Conclusion de la journée

 

Argumentaire

Au gré des évolutions de la société et des régimes politiques, différentes institutions sont apparues sur le territoire national. Pour les abriter et symboliser leur puissance, de nombreux édifices ont été construits au fil des siècles. Ces lieux de pouvoir sont les témoins de l’histoire politique et administrative du pays. Certaines institutions ont fait construire de nouveaux bâtiments sur un site déterminé. D’autres ont choisi de réinvestir, parfois en les transformant, d’anciens lieux de pouvoir, bénéficiant ainsi de leur prestige. Au début du XIXe siècle, de nombreuses préfectures s’installent ainsi dans des hôtels particuliers, d’anciens couvents ou palais épiscopaux. Lors des décennies suivantes, des hôtels de préfecture sont construits, avec l’ambition de traduire le faste dont la fonction préfectorale doit s’entourer. Le maillage administratif et politique du pays se fixe ainsi progressivement dans chaque département et son chef-lieu, pour se stabiliser de façon durable sous la Troisième République.

La seconde moitié du XXe siècle est marquée par une vaste entreprise de modernisation de l’État et de ses structures. Les années 1980 constituent à cet égard un véritable tournant. Cette période est en effet celle de l’affirmation du pouvoir des collectivités territoriales, directement issu des lois de décentralisation de 1982-1983. Des bâtiments sont alors aménagés pour accueillir les assemblées des élus et les services administratifs. La polarisation traditionnellement forte entre la préfecture et la mairie est remplacée par une configuration spatiale plus complexe des institutions du pouvoir civil : conseils généraux et conseils régionaux comptent désormais dans le panorama architectural des villes grandes ou moyennes.

Quelle que soit l’époque, ces édifices affichent tous la volonté de l’institution qu’ils incarnent de frapper les esprits, d’asseoir une légitimité, et de s’ancrer dans le temps par l’architecture et le décor. Leur histoire est souvent jalonnée d’évènements, parfois de destructions. Ils ont pu faire l’objet de transformations ou de réaffectations, liées notamment à de nouvelles fonctions. Le récent redécoupage régional, consécutif de la loi NOTRe du 7 août 2015, a ainsi ouvert la voie à des modifications d’usage d’un certain nombre de ces lieux de pouvoir, en particulier dans les régions où ont eu lieu des fusions. La question de leur devenir va de pair avec celle de leur patrimonialisation.

L’inscription dans l’espace de ces lieux de pouvoir prend donc une portée symbolique qui renseigne sur les ambitions et stratégies territoriales. Il constitue une porte d’entrée originale pour appréhender la présence et l’émergence de pouvoirs aux différentes échelles infranationales et conduit à réétudier avec profit les logiques de territorialisation de la vie politique. Plusieurs problématiques peuvent dès lors être envisagées : dans quelle mesure ces lieux de pouvoir sont-ils représentatifs du système politique qui les produit ? Quelle vision véhiculent-ils : sont-ils l’expression d’un pouvoir local ? Et en quoi reflètent-ils, plus particulièrement, les transformations politiques induites par les lois de décentralisation ? Autrement dit, s’inscrivent-ils dans une certaine continuité de l’action publique ou sont-ils, au contraire, l’affirmation ostentatoire de nouvelles formes de pouvoir politique ?

Du fait de la rareté des travaux d’historiens sur ce sujet et sur la période la plus contemporaine, la réflexion autour de l’émergence de la notion de « pouvoir local » dans le contexte de la décentralisation constituera un axe privilégié. Mais les analyses inscrites dans le temps long et l’approche comparée avec d’autres systèmes d’organisation politique seront aussi les bienvenus afin d’appréhender la question dans toute sa complexité et à travers ses dimensions plurielles. Espaces de commandement politique ou économique, objet de politique publique et d’aménagement, lieu d’expression des rites et lieux de mémoires politiques, édifices vecteurs d’identités, etc., les lieux de pouvoir ancrés dans les territoires locaux – hôtels de ville, d’EPCI, de département ou de région – empruntent en effet des formes variées qui ne se limitent pas à la puissance institutionnelle publique. Il s’agira ainsi de mesurer en quoi ceux-ci, par leurs différentes réalités, sont de bons révélateurs des mutations politiques, sociales et culturelles de la France contemporaine.